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Quand je m'assume dans la robe dont je parle dans l'article

Quand je m'assume dans la robe dont je parle dans l'article

Depuis Janvier 2018 je suis un cours du soir de théâtre, dans une compagnie.

J'ai déjà fait du théâtre il y a un peu plus de 2 ans, quand j'étais encore en Licence. J'avais adoré ! Mais avec le boulot que j'avais et l'approche du Master, j'avais préféré ne pas continuer et reprendre plus tard.

En 2017, j'ai eu mon Master en septembre mais mon stage se terminait fin novembre et j'étais dans un trou paumé du 95, je savais que je revenais dans le 91 après, je ne me voyais pas commencer le théâtre en septembre.

Quand je suis retournée chez mes parents fin novembre, j'étais dans un sale état (à cause du stage, mais j'en parlerai plus tard). Début décembre, j'ai eu une embrouille avec une amie qui m'est chère (ça a duré 4 mois mais je ne pouvais pas savoir sur le coup si on se reparlerait un jour ou pas). Bref je commençais à cumuler et j'avais besoin de me sortir de ma merde.

Avec chance, j'ai trouvé un cours de théâtre dans la compagnie où je suis actuellement, qui fait des sessions sur 6 mois. Cool !!! Me voilà au théâtre à nouveau !!! C'est plutôt différent de ce que j'avais connu. Là, on ne fera pas de représentation (mais en même temps sur 6 mois c'est compliqué lol).

Le prof est super, les gens sont sympa et le prof nous a proposé de se faire une pièce un soir à la Comédie Française. L'été après ma Licence de Psycho, j'ai visité le 1er arrondissement de Paris. J'ai foulé chaque rue. J'ai adoré faire ça. Et j'étais donc tombée face à la Comédie Française, le Jardin du Palais Royal juste à côté, et le Théâtre du Palais Royal au bout du Jardin. Je suis tombée amoureuse de cet endroit. Et depuis, j'ai toujours eu cette envie de mettre les pieds dans la Comédie Française. Bien au delà de l'architecture extérieure, c'est un lieu mythique !

Alors quand il nous a proposé ça, j'étais super contente évidemment ! On devait donc aller voir " La tempête " de Shakespeare.

J'ai commencé à psychoter. J'ai envie de tas de choses, mais je ne peux pas forcément les faire. Et je savais qu'il y avait des risques que mon cul ne passe pas dans les sièges. J'en ai parlé au prof à la fin d'un cours. Il a été bien, il m'a dit qu'il se renseignerait mais on n'en a jamais reparlé.

Et j'en ai marre de me priver de faire des choses dont j'ai envie, de ne pas avoir une vie normale à cause de mon poids ou à cause de ce que je crois que je ne peux pas faire.

Quelques jours avant la représentation, j'ai appelé la Comédie Française. J'ai exposé mon cas, la dame m'a dit " vous n'êtes pas au bon endroit " et m'a directement basculé vers un autre numéro sans rien dire d'autre. Ok ... La politesse elle ne connait pas. Je comprends que ça la fasse chier qu'on l'appelle pour quelque chose qui n'est pas de son ressort, mais ce n'est pas ma faute si c'est l'unique numéro, hors 08, qu'on trouve sur internet pour les contacter ...

Bref je tombe sur une autre dame, je re expose mon cas. J'ai regardé les photos de la salle avant d'appeler, j'ai zoomé sur les sièges (oui j'en suis à ce point) pour voir la proportion et je savais d'avance que c'était mort. Mais j'ai apprécié que la dame fasse l'effort de chercher la réservation pour voir où j'étais placée etc. pour voir ce qu'on pourrait faire. Ce n'est pas souvent que les gens se font chier comme ça. Alors quand c'est positif il faut le dire ! Au final elle n'a pas pu m'aider parce qu'elle ne trouvait pas le groupe avec qui j'étais. Par contre elle m'a dit de venir quand même et que de toute façon on trouverait toujours une solution. J'ai vraiment apprécié ! Je me suis sentie en confiance et ça m'a aidé à ne pas annuler.

J'avais envie d'annuler parce que même si je ne veux pas anticiper, il y a quand même des choses auxquelles je ne peux pas échapper. Déjà, je n'arrive presque plus à marcher. C'est un fait. Je ne tiens pas plus de 3 minutes debout (et encore, j'atteins 3 minutes parce que je me force). Quel rapport avec la Comédie Française ? Eh bien si de ma voiture à la salle, c'est trop loin, je ne pourrai pas. J'avais regardé les parkings en avance et c'était à 400 ou 500 mètres. Je me suis dit que je verrai visuellement combien ça fait mais je savais déjà que c'était beaucoup trop long pour moi. Mais je ne me suis pas laissé abattre par ça, je me suis dit que j'arriverai longtemps en avance et que je tournerai dans le quartier, je trouverai bien une place pas trop loin.

Ensuite, je sais d'avance que les sièges c'est mort vu que j'ai checké sur internet. Ce qui signifie que vu que la dame ne m'a pas retrouvé dans les réservations avant, elle ne peut pas me placer en avance sur une chaise ou truc comme ça (j'ai vu qu'à l'étage il y avait des coins avec des chaises). Donc il faut se pointer, aller avec ma troupe de théâtre au rang qu'on nous a donné, et dire à l'hôtesse que je ne peux pas m'asseoir. Il ne va pas y avoir de scandale. Mais tout le monde autour du siège qui me sera originairement affecté, verra la scène. Les inconnus, je m'en fou un peu. Mais les gens de ma troupe, je les revois toutes les semaines. 6 ans en arrière, j'aurai annulé à cause de cette situation, pour ne pas vivre ce moment que j'aurai perçu comme de la honte. Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est la honte, aujourd'hui. Par contre c'est gênant oui. Parce que tout à coup il va y avoir un focus sur moi, il va falloir régler le truc, l'hôtesse va me faire patienter pour trouver ailleurs. Si je rentrais dedans (sans être forcément mince hein), j'assisterai à une représentation théâtrale avec les gens de la troupe, on rigole on pleure, on fait tout ce qu'on veut, chacun rentre chez soi, basta. Et c'est cette normalité qui me manque. J'en ai marre d'être sous la lumière, pour la mauvaise raison. Alors pareil, malgré ça, et aussi parce que la dame au tel me rassure, je me dis que j'y vais.

La pièce c'est le samedi. Tout ce que je dis au dessus se produit avant le mercredi. Le mercredi j'ai théâtre. Le prof nous dit qu'il faut se saper. Qu'il voit parfois des gens venir dans des tenues ... c'est quand même la Comédie Française. Puis le samedi arrive. J'étais dans une bonne humeur. Mais toutes les pensées du dessus commençaient à être dans ma tête. Mais ça ne m'empêchait pas de me dire que j'y allais. J'ai 2 tenues de sortie. 2 robes. Une bordeaux que j'adore mais j'ai pris beaucoup de poids et depuis que je l'ai acheté il y a quelques années, j'ai pris près de 50kg. Je rentre toujours dedans parce qu'elle est dans une matière extensible. Mais je n'aime plus la mettre depuis 1 an environ parce qu'elle remonte à cause de mon ventre et je ne me sens pas du tout à l'aise dedans. Je me trouves mieux en jean, que dans la robe. Ok donc plus qu'une tenue. C'est une robe que j'ai acheté chez Eloquii. Sauf que Eloquii s'arrête au 28 (taille US), ce qui correspond à du 60 en France. Je me suis dit que c'était bon. C'est une robe qui est sensée être évasée sauf à la taille où il y a un cordon pour serrer. Un peu comme une robe qui ressemble à une chemise large avec un cardon pour serrer. Donc ça c'est la photo. Et sur moi, c'est tellement serré qu'on dirait qu'elle m'a été peinte dessus. Quand je l'ai reçu en début d'année, j'ai assumé. J'étais en mode, ouais elle me serre de ouf, ouais elle n'est pas sensé faire ça, ouais mais j'suis quand même bien dedans, ça me fait plaisir d'être autrement qu'en jean. Je l'ai mise 2 fois depuis que je l'ai acheté.

Et là, je l'essaie, je me regardes dans le miroir, et je fonds en larmes. Je me suis dis, mais putain qu'est ce que je suis moche ! Mais je ne peux pas mettre ça, c'est horrible ! Ce n'est pas que je n'ai pas de seins, mais je suis tellement grosse du ventre qu'on dirait que je n'ai rien. Du coup avec cette robe, on voit que je ne rempli pas le haut,c'est un peu lâche au niveau des seins. Et d'un coup il y a cette énorme masse qui est extrêmement serrée dans la robe et après les genoux elle redevient lâche. Déjà, quel est ce délire, qui est le même pour les soutiens gorges : plus tu es grosse plus tu as de gros seins ? Non ! Beaucoup de grosses ont de gros seins, du coup les vêtements sont confectionnés autour de ça. Mais moi je ne connais pas ma taille, elle n'existe pas. Si je prends mon tour de taille, le bonnet est 100 fois trop grand, si je prend ce qui semble être bon au bonnet, le tour ne va pas. Il y a les rajouts mais je dois en mettre 4. Donc ça décale l'endroit de la bretelle et ça tombe tout le temps donc pas de maintien. En fait c'est comme si les seins devaient forcément être proportionnels au poids. Mais non ! 

Et la robe c'est la même. C'est comme un cache cœur un peu. Je vous vois venir hein "portes ce qui te plait ". Oui, mais je n'en suis pas encore au point où je me sens bien au point de mettre ce que je veux et me foutre de tout. Je suis entre deux. Il y a des jours où la robe je l'ai assumée. Et d'autres, comme là, où je la voyais sous un angle négatif. Et je pleurais encore et encore. Surtout qu'avec la robe, je met des baskets. Je ne peux rien mettre d'autre, depuis de nombreuses années. Et ce n'est pas une question de pieds larges mais de pieds gonflés sur ce qu'on appelle le coup du pied. Mes pieds ne passent plus dans aucune chaussures. Même des petites baskets en tissu ou des converses, ça ne fonctionne plus. Et dans les jours où mes pieds sont les plus gonflés, je n'arrive pas à mettre mes baskets non plus ... Bon c'est rare, mais ça m'est arrivé de devoir annuler des trucs parce que mes pieds ne rentraient pas dans mes superstars ...

J'en ai deux paires. Une blanche qui s'est élargie et que je met avec presque pas de problème. J'en ai eu une autre paire, noire, en décembre. Il faut que je force de ouf pour entrer dedans. Donc je garde mes superstars blanches défoncées.

Quoi qu'il arrive j'ai des baskets. Et le prof nous dis de nous saper, je me suis dit ça va passer si j'ai une robe avec. Et apparemment c'est la mode les gens font ça donc ça tombe bien pour moi.

J'allais annuler, j'étais dans un sale état, il ne me restait pas beaucoup de temps avant de devoir partir. Mais si j'ai aucune tenue bien, je ne peux pas si il faut se saper ! J'ai eu ma mère au téléphone et elle m'a aidé. Dans ma tête c'était presque catégorique que je n'y allais pas. Et elle a mis du temps mais au bout de 30/45 minutes de tentative de me convaincre, de calme puis à nouveau des pleurs puis calme, j'ai fais ce qu'elle m'a dit. Je n'aime pas montrer ça. Mais comme je lui ai dit " je sais qu'en pleurant comme ça on dirait que je ne gère pas, mais en fit, c'est exactement ce que je fais. Mon soucis à moi c'est d'enfouir mes émotions et de manger pour me libérer. En pleurant, je me laisse ressentir. Alors c'est dur, mais je fais ce qu'il faut ".

Pour elle, tant pis, je ne devais pas écouter le prof, je met mon jean, mes baskets et mon hauts bleu ciel qui passe bien. Et personne ne me dirait rien. J'étais obnubilé par cette phrase " il faut se saper ". Je ne voulais pas qu'on se dise que je ne veux pas faire d'efforts, ou que je ne peux pas m'habiller autrement vu que je suis grosse.

Heureusement que ma mère a répondu et qu'elle m'a aidé. Et je ne sais pas, a un moment c'est rentré. Elle m'a dit " là tu vas raccrocher, tu prends ton jean bleu, ton débardeur, ton haut bleu ciel, tu les repasse, tu essaie et tu me rappelle après ". Et je ne sais pas, ça a tilté. C'était dur de me pousser à faire le contraire de ce que j'avais déjà décidé. Mais je l'ai fait. Puis je me suis maquillée, ma mère m'a dit de le faire. A l'origine je ne voulais pas. Je ne suis pas une grande adepte du maquillage, en plus j'ai tendance à faire des allergies (ouais je cumule). Mais je me suis maquillée quand même. Je me suis regardée dans la glace. Je me sentais mieux comme ça, et tant pis si quelqu'un n'était pas d'accord, je me voyais déjà répondre " on fait comme on peut ". Ce qui a aidé c'est aussi que ma mère me dise que je ne vais pas me priver de ça, pour une histoire de tenue.

Et c'est vrai que ça faisait un moment que je luttais contre cette idée d'annuler. J'ai dis oui à la place alors que j'aurai pu dire non tout de suite en prévision, j'ai payé la place, j'ai regardé sur internet, j'ai appelé la Comédie Française et surtout, j'en ai vraiment mais vraiment marre de m'interdire de vivre. La tenue c'était la goutte d'eau, mais je me suis quand même forcée.

J'ai réussi à sortir de chez moi, me voilà en route. La fierté en cet instant putain ! C'est extrêmement difficile pour moi de revenir sur une décision ferme et définitive.

J'appelle ma mère, elle est contente et me dit de lui raconter la pièce quand je rentrerai. Ça roule super bien, aucun bouchon ! Alors que d'habitude l'embranchement de la A6a/A6b c'est une catastrophe pour aller vers la porte de bercy. Bref, j'arrive à la Comédie Française environ 1h avant l'heure de rdv devant. Je suis large. Je commence à faire le tour. Pas de place. Bon je m'y attendais hein. Je savais que je ne trouverai pas de place tout de suite, à moins d'avoir un gros coup de bol. Mais j'avais prévu, c'est pour ça que je partais plus tôt. Je tourne, toujours rien. Et j'ai tourné pas mal de temps. Rien. Je m'éloigne un peu plus dans les rues avoisinantes, en sachant pertinemment que si je trouves une place, c'est trop loin pour moi. Je trouves une place. Je me pose la question. Non, c'est trop loin je ne pourrai pas. Mon maquillage commence à me piquer. L'heure tourne, alors je commence à envisager le fameux parking qui me semblait loin. Je me dis que je n'ai rien à perdre (à part de l'argent ah ah). Je me met en warning, je met le parking dans Waze et je passe volontairement devant la Comédie Française pour voir la distance à pied. J'arrive au parking. Avant d'entrer dedans, je savais déjà que c'était mort. Mais il était 19h45, on avait rdv devant à 20h. Alors j'entre dans le parking. Je trouves une place proche de la sortie. Et là, aucun ascenseur ne fonctionne. Je dois me taper les marches et la marche à pied derrière. Je met mon pied sur la première marche. Je sais que je ne peux pas. Ou je peux, mais je n'arriverai pas en 15 minutes. Ce n'est pas grave je peux dépasser, la pièce commence à 20h30. Mais même si je peux dépasser en prévenant, je ne peux pas. C'est trop loin.

Je n'ai pas autant marcher depuis des années je pense, pas d'affilé en tout cas. Et il n'y avait pas de bancs sur le trajet à pied. J'ai trouvé une place plus proche auparavant et même celle là je l'ai laissé car je sais ce que je peux faire et ce que je ne peux pas. Alors je fais demi tour. Je remonte dans ma voiture, le parking ne m'a pas fait payer pour si peu de temps (ouf). Je retourne vers la Comédie Française, je préviens que je vais avoir du retard. Je tourne encore et toujours. Le temps passe, ils me disent que ma place est à l'entrée. Il est 20h30. J'abandonne.

J'ai plusieurs émotions en même temps.

Une très grande frustration : tout ça, tout ce vécu pendant la semaine et aujourd'hui, pour ça ? C'est tellement aberrant, que j'en éclate de rire ! Sérieusement ??! Donc je n'ai pas loupé la pièce parce que je me suis sentie comme une merde dans ma tenue, j'ai fais tout ces efforts, je me suis poussée pour ne pas tomber dans mes annulations habituelles par peur de ne pas pouvoir. Mais j'ai loupé la pièce parce que je n'ai pas trouvé une putain de place suffisamment proche ?

Dans un sens, j'étais soulagée. Vu l'heure, même avec une place, tout le théâtre est assis et moi j'arrive en mode mon gros cul ne passe pas dans vos sièges. Quand tout le monde cherche sa place, ça passe. Mais quand tout le monde est prêt et toi tu débarques, ce n'est pas quelques personnes qui sont focus sur toi. Au delà de ça, j'étais soulagée de pouvoir rentrer chez moi. Et dans le fond, c'était tellement aberrant que ça ne m'a rien fait. J'étais plus soulagée de pouvoir mettre ça derrière moi.

Le prof m'a dit qu'il était désolé pour la frustration. Je lui ai répondu que ce n'était pas sa faute, que c'est chiant sur le coup mais qu'il y a pire dans la vie. Et c'est vrai.

Le prof et les personnes du théâtre ne savent pas de toute façon. Eux pensent seulement que je ne trouvais pas de place et c'est tout. Le prof m'a parlé du parking souterrain à un moment. Je n'ai pas répondu. J'aurais dit quoi ? Oui j'ai vu, j'ai même prévu depuis une semaine mais je ne peux pas parce que j'ai regardé le chemin et 400/500 mètres à pied c'est trop loin pour moi.

Je ne peux pas. Déjà je montre ma faiblesse tous les mercredi, je trouves que c'est suffisant. On fait une sorte d'échauffement où on est debout. Ça dure 20 minutes environ je dirai, parfois moins. Mais quand je suis à mon max de temps debout, je prends une chaise et je m’assoie. Tant pis ! Mon corps avant le regard/ les pensées des gens. Et je suis contente de ça. Avant j'aurai subit ou j'aurai arrêté le théâtre ou je n'aurai carrément pas commencé.

Voilà ma vie, mon quotidien. Welcome to my life.

 

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